La Grand’Anse évite le piège de l’enclavement


Certaines organisations paysannes, dans la Grand'Anse, recourent à la transformation de fruits récoltés de leur jardin pour sortir du piège de l'enclavement géographique. Elles parcourent de longs trajets pour écouler les produits transformés qui sont ainsi plus faciles à transporter.

La piste qui relie la route principale de la Grand’Anse – chantier abandonné par la firme brésilienne OAS – à Pestel est particulièrement caillouteuse et les ornières y sont profondes. Seuls les véhicules tout terrain et les camions osent s’y aventurer. Tout à coup, en arrivant sur un plateau, nous tombons sur une longue antenne pointant vers les nuages duveteux. Nous sommes à Moline, section communale de Pestel.

« Gou-T HT » (goûter et acheter, en créole), invitent les écriteaux presque aussi pâles que la peinture du mur de la bâtisse en béton, construite il y a huit ans par le ministère de l’Agriculture et des Ressources naturelles. Une usine de transformation a été implantée depuis par le ministère pour aider la communauté à sortir du piège de l’enclavement géographique. La vie de plusieurs centaines de familles de Moline et des localités avoisinantes dépend du rythme de fonctionnement de la petite industrie de transformation dont la gestion est confiée à l’Unité de transformation de beurre d’arachide de Pestel (Utap). Pas moins de 49 femmes œuvrent, sans relâche, pour faire prospérer la petite usine. Quelque 300 femmes au total sont affiliées à l’organisation spécialisée dans la production de beurre d’arachide, de confiture et de crémas (boisson alcoolisée à base de noix de coco, de sucre et de lait).

Tombée en vétusté pendant plusieurs années, la petite usine de transformation a vu son label « Gout-T HT » requinqué grâce à un appui financier et technique de Caritas Haïti. « En plus d’une aide financière, le réseau Caritas Haïti nous a offert des sessions de formation », a expliqué Monique Alexis, présidente de l’Utap. «Nous ne lésinons pas sur les normes d’hygiène pour préparer nos produits», a indiqué Mme Alexis, heureuse d’accueillir une forte délégation de Caritas Haïti, en marge de la 28e Assemblée générale du réseau qui s'est tenue à Léon, localité de Jérémie. Gants, cache-nez, mouchoirs de tête sont obligatoires à l'intérieur de la petite usine contenant des machines à éplucher et d’autres pour transformer les produits.

L’aide de Caritas Haïti ne se limite pas aux appuis financiers et techniques. Sur le site très boisé du réseau à Léon une boutique est consacrée aux produits transformés dans tout le département de la Grand’Anse. «Nous encourageons la production et la consommation nationales», clame un agent pastoral qui écoule allègrement les bocaux de beurre  d’arachide, de confiture, les bouteilles de crémas, de vin de maïs et d'orange…sous un hangar recouvert en paille.

«Avec l’enclavement géographique de la région, la transformation est la seule alternative qui reste pour empêcher le gaspillage des produits», a estimé Marjorie Jean, responsable du projet d’Economie solidaire (Ecosol) du diocèse de Jérémie. Tout en vantant les potentialités touristiques de la région, Mme Jean prône la création de marchés. Les responsables d’associations, en attendant, parcourent de longs trajets pour écouler les produits transformés, plus faciles à transporter. A Jérémie, à Pestel, à Port-au-Prince, … elles visitent les villes pour profiter des foires agricoles.

Claude GILLES