Alors qu’on célèbre jeudi, la Journée mondiale de la femme, Maximini tend le micro aux femmes de Martinique.
Des témoignages et des analyses pour faire le point sur les conditions de vie des Martiniquaises.« Marre de cette position de poto-mitan ! C’est ça qui met la société dans cet état-là ! », lance Sarah, mère de famille trentenaire et célibataire. Selon elle, le modèle du poto-mitan n’intéresse plus les Martiniquaises, victimes de la réputation de super woman qui leur colle à la peau. On a tendance à oublier que la réalité de ces femmes est souvent bien différente.
« Au quotidien, c’est la galère » : père absent ou presque de l’éducation des enfants, financièrement n’en parlons même pas…
« Nous somme seules, il n’y a aucun soutien pour notre tranche d’âge. Les femmes sont vraiment abandonnées… On nous croit super fortes », pas le droit de se plaindre, ni de baisser les bras, toujours penser aux autres avant de penser à soi.
Selon Sarah, ce qu’il faudrait c’est une vraie complémentarité avec les hommes. Malheureusement, nous sommes encore bien loin de ce schéma : perte de repères ou tout simplement legs d’un passé qui remonte bien avant la colonisation ?
Le constat de Sarah est sans appel : les hommes martiniquais sont souvent «fainéants, incapables». Mais pas de fumée sans feu, selon Sarah : pour comprendre le pourquoi du comment, il faut peut-être se référer à la thèse de l’anthropologue martiniquais Gerry L’Etang sur la question. Ce n’est pas par hasard si nous vivons dans une société matrifocale. Déjà autrefois, Madikera ( » l’île aux fleurs « ) se prénommait Matinino, » l’île aux femmes » ou » l’île sans homme « .
Ce nom a été donné par les Caraïbes lorsqu’ils ont pris possession de l’île et se sont imposés aux Arawaks. Les Caraïbes ont exterminé les hommes et ont laissé vivre les femmes et les enfants pour faire perdurer la culture Arawak, plus pacifiste que la leur.
Depuis, le modèle matrifocal n’a guère évolué, même si le mariage et le Pacs ont gagné du terrain. Cela n’empêche que près d’un foyer sur trois est monoparental en Martinique, avec à sa tête, une mère de famille seule, comme Sarah.
Après avoir déposé ses deux filles à l’école, la mère laisse la place à la femme active. Sarah est couturière depuis quelques années, elle a son atelier à domicile. Elle s’est formée à l’AFPA de Trinité et s’est déclarée auto entrepreneur pour lancer son activité. Mais la confection de vêtements ne permet pas toujours de boucler les fins de mois, alors Sarah donne également des cours de couture à des enfants…
Ses journées sont longues et se terminent souvent sur le tard. Après être allée chercher les enfants à 16 heures, s’être occupée des devoirs de classe, du dîner et du coucher, Sarah rejoint sa machine à coudre. Elle y restera une bonne partie de la soirée. Sarah ne travaille pas dans un bureau. Elle sait à quelle heure démarre sa journée, mais jamais à quelle heure elle se finira. Car on ne compte pas quand il s’agit de subvenir seule, aux besoins de sa famille.
Alors oui, Sarah est une femme poto-mitan comme des milliers d’autres en Martinique, qui se battent au quotidien. Mais ce ne sont certainement pas des « super woman »!…Juste des femmes.
Quelques chiffres :
Chômage/ Emploi :
Sur 100 chômeurs, il y a 70 femmes.
Profil type du demandeur d’emploi : une jeune femme de 25 ans.
En 2011, le taux de chômage chez les femmes s’élève à 22,5% et chez les hommes à 18,9%.
Plus de 70% des contrats à durée déterminée ou précaires sont des femmes.
En moyenne, les salaires des femmes sont inférieurs de 25% à ceux des hommes.
80 % des salariés touchant moins que le Smic, sont des femmes à 74 % en temps partiel.