Congrès des élus : plus de dix heures de débat… Et après ?


Le débat aura permis de noter une certaine désorganisation et une image confuse transmise par nos élus.

Bel exercice de démocratie, vendredi dernier, au Palais du Conseil général à Basse-Terre. Mais ce n'est qu'un consensus "a minima" qui a été trouvé : les échanges sur le Projet guadeloupéen devront se poursuivre…

La finalisation et les modalités de poursuite de la concertation avec la population sur le "Projet guadeloupéen de société" ; la finalisation de la préfiguration de blocs de compétences cohérents, concourant à l'efficacité et à la lisibilité des politiques publiques ; et débattre des options institutionnelles offertes par l'article 73 de la Constitution et envisager les modalités selon lesquelles la population devra être consultée sur ce point.

Tel était l'ordre du jour du 14e Congrès des élus départemental et régionaux, organisé vendredi au Palais du Conseil général, à Basse-Terre.

Mais après plus de dix heures de débats, où en sommes-nous véritablement ? A admettre qu'il va falloir poursuivre les échanges sur le Projet guadeloupéen de sorte à ajouter un volet sur l'évolution institutionnelle… Avant fin 2013.

C'est le consensus « a minima » qui a été trouvé, et c'est le principal enseignement à tirer de ces longs échanges, alimentés également par des interventions d'experts, personnes ressources et universitaires rassemblés pour l'occasion.

Des positions divergentes

Principal enseignement, disions-nous. Mais on retient aussi les positions divergentes entre le président du Conseil général, Jacques Gillot, et son homologue du Conseil régional, Josette Borel-Lincertin.

Quand le premier continue à défendre la création d'une collectivité unique et la tenue d'un référendum afin que la population arbitre le débat, la seconde — qui fait davantage confiance à l'Acte III de la décentralisation — pense qu'il ne faut pas donner aux institutions des vertus qu'elles n'ont pas : elles ne suffisent pas à créer des emplois, et ne créent pas, comme par magie, les conditions favorables au développement…

Ce 14e Congrès avait pour ambition d'expliciter la démarche prenant appui sur les contributions écrites au Projet guadeloupéen, ainsi que sur les auditions d'experts, partis politiques, conseils consultatifs, corps constitués et représentants de la société civile.

Il s'agissait aussi de recadrer le débat de décembre dernier à la Région, durant lequel deux des trois résolutions adoptées avaient clairement ouvert la porte à un basculement vers l'article 74 de la Constitution, autrement dit vers une large autonomie.

Et pour cela seulement, ce Congrès de ce 15 mars se voulait utile. D'autant que, pour la première fois, les différents points de vue ont été avancés avec tolérance et sincérité.

Témoignages en séance, avec les interventions croisées des deux présidents d'Assemblée.

Josette Borel-Lincertin : "Notre peuple a droit à la clarté"

« Notre peuple, sur ces questions institutionnelles, a droit à la clarté. Il exige – à raison – qu’on lui livre la vérité de nos intentions, car il n’a pas son pareil pour débusquer derrière les pensées, ces arrière-pensées que certains élus dissimulent parfois si mal.

J’ai la curieuse impression qu’il nous est proposé de poursuivre le travail d’élaboration du projet de société, tout en nous invitant à considérer que seule la question institutionnelle, qui ne figure pourtant pas parmi les priorités des Guadeloupéens, est jugée mûre et prête à être mise en œuvre.

Comme si, finalement, la seule réponse politique que nous ayons à formuler, à ce stade avancé de l’élaboration du projet de société, c’est de changer nos institutions. Comme si, en réalité, l’objectif de tout ce travail n’était que de relancer un processus de bouleversement institutionnel que les Guadeloupéens ont majoritairement rejeté en 2003.

Et c’est peut être cela qui fonde les divergences qui ont pu s’exprimer entre nous ces dernières semaines et que nous ne devons pas cacher aux Guadeloupéens… Soyons ambitieux pour la Guadeloupe, soyons optimistes face à l’avenir, soyons combatifs face à l’adversité. Mais avant tout, soyons exigeants et vigilants dans ce que nous mettons en œuvre pour le devenir de nos enfants. »

Jacques Gillot : "Il nous faut vaincre nos rivalités"

« Notre ambition, à l’occasion de ce Congrès, c’est d’apporter une réponse politique aux préconisations formulées par nombre de Guadeloupéens. Il s’agit pour nous de faire en sorte que l’action publique locale gagne en efficacité, en cohérence et en lisibilité, en mettant en place des institutions rénovées, qui feraient l’objet d’une organisation différenciée, tout en continuant de relever de l’article 73 de la Constitution.

Il nous faut surtout vaincre nos rivalités pour nous asseoir, toutes et tous, autour de la table, pour élaborer l’architecture de notre destinée commune à la faveur de la conjoncture historique qui s’offre à nous.

Profitons de la forte représentation des Outremers au sein du Gouvernement et de la force de persuasion de notre collègue et Ministre des Outremers. Profitons de ce contexte historique pour dire ce que nous voulons pour notre pays, sans attendre que Paris ne décide à notre place.

Profitons d’avoir un Président de la République qui est à notre écoute et que nous avons majoritairement soutenu ici !

L’acte III de la décentralisation présente certes des avancées indéniables en terme de démocratie, mais nous devons avoir le courage et l’honnêteté de reconnaître qu’il n’a pas été conçu pour la Guadeloupe ! »

Julie MONTANA