Demande de relaxe pour un architecte accusé d’usurpation de diplôme

J.M., architecte d'origine libanaise installé à Saint-Martin, est accusé, par l'un de ses clients, d'avoir dit qu'il était architecte DPLG alors qu'il ne l'est pas. L'audience va montrer une confusion juridique de l'emploi de ce terme par la profession, qui a induit en erreur l'architecte.

DPLG. Quatre lettres qui ont fait couler beaucoup d’encre. J.M., architecte à Saint-Martin, est accusé d’avoir écrit ces quatre lettres à côté de son nom sur son enseigne, alors qu’il n’en avait pas le droit. DPLG est un sigle utilisé pour désigner un architecte diplômé par le gouvernement français, or J.M. ne l’est pas. Il est simplement architecte.

D'où une plainte déposée contre lui, en 2006, pour usurpation de diplôme par des anciens clients* qui l'a amené à la barre du tribunal correctionnel, jeudi dernier.

Victime d'une "erreur"

En 1993, J.M. demande à l'ordre des architectes de Guadeloupe une reconnaissance de son diplôme, obtenu en 1983 à l'université de Beyrouth, ainsi qu'une inscription. Une démarche qui lui sera refusée. « On m'a dit que mon diplôme n'était pas reconnu par la France aux termes DPLG », explique J.M. aux juges.

En 1999, lors d'un séjour à Paris, il discute avec l'un de ses amis, également architecte en France, inscrit à l'ordre d'Île-de-France et titulaire du même diplôme, obtenu dans la même université que lui. J.M. ne restera pas longtemps dans l'incompréhension. Aussitôt, il se rend à l'Ordre des architectes de Paris et fait part de sa situation. Il lui est alors expliqué qu'il a été « victime d'une erreur », car son diplôme est bien reconnu par la France.

« On m'avertit aussi que le lendemain, il y a justement une commission et que si j'apporte mon dossier complet de demande d'inscription à l'Ordre, celui-ci pourrait être traité », raconte J.M aux juges, qui sera ainsi inscrit à l'Oordre des architectes de Paris. Seulement, il fait une mauvaise interprétation de son « inscription en la qualité d'architecte ».

Comme en 1993, l'Ordre de Guadeloupe lui avait uniquement indiqué, dans un bref courrier, la non équivalence « aux termes  DPLG », J.M. en déduit, en 1999, que sa reconnaissance par l'Ordre de Paris l'est. D'où l'apposition de ces quatre lettres sur son enseigne. Ce qu'il n'aurait pas dû puisque son diplôme n'a pas été délivré par le gouvernement français mais par le Liban.

"Pénalement irresponsable"

Néanmoins, cela ne l'empêche pas d'être reconnu comme architecte en France. « Tous les architectes en France ne sont pas DPLG, comme ceux qui ont eu leur diplôme à l'école de Strasbourg », précise son conseil, maître Vayrac, lors de l'audience. Toutefois, « comme 96% d'entre eux le sont, cette appellation DPLG est entrée dans le langage commun pour désigner un architecte », souligne l'avocat, en lisant des extraits de jugements de la Cour de cassation mentionnant l'expression « DPLG » et non le terme « architecte » pour désigner un architecte.

« Une confusion dans l’esprit du prévenu qui est architecte et non pas juriste », admettra le substitut du procureur de Basse-Terre, selon lequel J.M. est « pénalement irresponsable ». D'où une demande de relaxe.

Le jugement a été mis en délibéré au 21 mars.

* NB : Ces clients l'ont aussi poursuivi au civil pour des malversations dans la maison qu'il avait réalisée. Ils ont obtenu 100 000 euros de dommages-intérêts.

 

Estelle GASNET